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20 mai 2010 4 20 /05 /mai /2010 20:59

Mon bras pressait ta taille frêle
Et souple comme le roseau;
Ton sein palpitait comme l'aile
D'un jeune oiseau.

Longtemps muets, nous contemplâmes
Le ciel où s'éteignait le jour.
Que se passait-il dans nos âmes ?
Amour! Amour!

Comme un ange qui se dévoile,
Tu me regardais, dans ma nuit,
Avec ton beau regard d'étoile,
Qui m'éblouit.

Victor Hugo

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14 mai 2010 5 14 /05 /mai /2010 22:47

Le jour ne perce plus de flèches arrogantes
Les bois émerveillés de la beauté des nuits,
Et c'est l'heure troublée où dansent les Bacchantes
Parmi l'accablement des rythmes alanguis.

Leurs cheveux emmêlés pleurent le sang des vignes,
Leurs pieds vifs sont légers comme l'aile des vents,
Et la rose des chairs, la souplesse des lignes
Ont peuplé la forêt de sourires mouvants.

La plus jeune a des chants qui rappellent le râle:
Sa gorge d'amoureuse est lourde de sanglots.
Elle n'est point pareille aux autres, - elle est pâle;
Son front a l'amertume et l'orage des flots.

Le vin où le soleil des vendanges persiste
Ne lui ramène plus le généreux oubli;
Elle est ivre à demi, mais son ivresse est triste,
Et les feuillages noirs ceignent son front pâli.

Tout en elle est lassé des fausses allégresses.
Et le pressentiment des froids et durs matins
Vient corrompre la flamme et le miel des caresses.
Elle songe, parmi les roses des festins.

Celle-là se souvient des baisers qu'on oublie...
Elle n'apprendra pas le désir sans douleurs,
Celle qui voit toujours avec mélancolie
Au fond des soirs d'orgie agoniser les fleurs.

Renée Vivien

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14 mai 2010 5 14 /05 /mai /2010 22:29

Pouacre
Boit:
Nacre
Voit:

Acre
Loi
Fiacre
Choit!

Femme
Tombe
Lombe

Saigne
Geigne
Clame!

Arthur Rimbaud

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14 mai 2010 5 14 /05 /mai /2010 22:29

Pouacre
Boit:
Nacre
Voit:

Acre
Loi
Fiacre
Choit!

Femme
Tombe
Lombe

Saigne
Geigne
Clame!

Arthur Rimbaud

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13 mai 2010 4 13 /05 /mai /2010 21:47

Tel qu'en lui-même enfin l'éternité le change
Le poète suscite avec un glaive nu
Son siècle épouvanté de n'avoir pas connu
Que la Mort triomphait dans cette voix étrange

Eux comme un vil sursaut d'hydre oyant jadis l'ange
Donner un sens plus pur aux mots de la tribu
Proclamèrent très haut le sortilège bu
Dans le flot sans honneur de quelque noir mélange

Du sol et de la nue hostile ô grief
Si notre idée avec ne sculpte un bas-relief
Dont la tombe de Poe éblouissante s'orne

Calme bloc ici-bas chu d'un désastre obscur
Que ce granit du moins montre à jamais sa borne
Aux noirs vols du Blasphème épars dans le futur

Stéphane Mallarmé

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12 mai 2010 3 12 /05 /mai /2010 15:33

La Cigale ayant baisé
Tout l'été,
Se trouva fort dépourvue,
La chaude-pisse étant venue.
Pas un seul petit fétu
De cubèbe ou de copahu.
Elle alla montrer sa pine
A la fourmi sa voisine
La priant de lui prêter
Quelque astringent pour arrêter
Cet écoulement rebelle.
- "Je vous ferai," lui dit-elle,
"Minette, foi d'animal!
Si vous guérissez ce mal."
La fourmi rit de la farce
Et, se grattant le bibelot:
- "Que faisiez-vous au temps chaud?"
Demanda-t-elle à la garce.
- "Nuit et jour, à tout venant,
Je baisais, ne vous déplaise!".
- "Vous baisiez, j'en suis fort aise;
Eh bien! Coulez maintenant!"

Saint-Louis

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 19:21

Un hydrolat lacrymal lave
Les cieux vert-chou
Sous l'arbre tendronnier qui bave,
Vos caoutchoucs

Blancs de lunes particulières
Aux pialats ronds,
Entrechoquez vos genouillères,
Mes laiderons!

Nous nous aimions à cette époque,
Bleu laideron!
On mangeait des oeufs à la coque
Et du mouron!

Un soir, tu me sacras poète,
Blond laideron:
Descends ici, que je te fouette
En mon giron;

J'ai dégueulé ta bandoline,
Noir laideron;
Tu couperais ma mandoline
Au fil du front.

Pouah ! mes salives desséchées,
Roux laideron,
Infectent encor les tranchées
De ton sein rond!

Ô mes petites amoureuses,
Que je vous hais!
Plaquez de fouffes douloureuses
Vos tétons laids!

Piétinez mes vieilles terrines
De sentiment;
- Hop donc ! soyez-moi ballerines
Pour un moment!...

Vos omoplates se déboîtent,
Ô mes amours!
Une étoile à vos reins qui boitent
Tournez vos tours!

Et c'est pourtant pour ces éclanches
Que j'ai rimé!
Je voudrais vous casser les hanches
D'avoir aimé!

Fade amas d'étoiles ratées,
Comblez les coins!
- Vous crèverez en Dieu, bâtées
D'ignobles soins!

Sous les lunes particulières
Aux pialats ronds,
Entrechoquez vos genouillères,
Mes laiderons!

Arthur Rimbaud

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 19:15

La très-chère était nue, et, connaissant mon cœur,
Elle n'avait gardé que ses bijoux sonores,
Dont le riche attirail lui donnait l'air vainqueur
Qu'ont dans leurs jours heureux les esclaves des Mores.

Quand il jette en dansant son bruit vif et moqueur,
Ce monde rayonnant de métal et de pierre
Me ravit en extase, et j'aime à la fureur
Les choses où le son se mêle à la lumière.

Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d'aise
À mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise.

Les yeux fixés sur moi comme un tigre dompté,
D'un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses;

Et son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l'huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne,

S'avançaient, plus câlins que les Anges du mal,
Pour troubler le repos où mon âme était mise,
Et pour la déranger du rocher de cristal
Où, calme et solitaire, elle s'était assise.

Je croyais voir unis par un nouveau dessin
Les hanches de l'Antiope au buste d'un imberbe,
Tant sa taille faisait ressortir son bassin.
Sur ce teint fauve et brun le fard était superbe!

- Et la lampe s'étant résignée à mourir,
Comme le foyer seul illuminait la chambre,
Chaque fois qu'il poussait un flamboyant soupir,
Il inondait de sang cette peau couleur d'ambre!

Charles Baudelaire

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 19:10

Je t'ai rêvée en la naïveté des choses,
Et j'ai parlé de toi aux plus vieilles d'entre elles,
À des champs, à des blés, aux arbres, à des roses.
Elles n'en seront pas pourtant plus éternelles,
Mais d'elles ou de moi celui qui doit survivre
En gardera quelque douceur pour ses vieux jours...
Je m'en vais les quitter, puisque voici les givres.
Tu ne les connaîtras jamais... les temps sont courts...
Mais vous ne pouvez pas vous être indifférentes,
Simplement parce que je vous ai très aimées...
Ô les toutes petites et si vieilles plantes!
Moi qui ne me les suis jamais imaginées
Hors de leur sol natal, ce m'est un grand chagrin
De savoir qu'elles mourront sans t'avoir connue...
Elles ont des airs si résignés, si sereins,
Et si tristes de ce que tu n'es pas venue!...
Que mon cœur soit pour toi le grand champ paternel,
Où si tu n'es pas née au moins tu dois mourir.
Que je te plante en moi, germe de toute rose,
Pour oublier que tu vécus ailleurs qu'en moi. -
Et tu passeras moins qu'ont passé bien des choses.

Henri Bataille

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7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 18:30

Miss Ellen, versez-moi le Thé
Dans la belle tasse chinoise,
Où des poissons d'or cherchent noise
Au monstre rose épouvanté.

J'aime la folle cruauté
Des chimères qu'on apprivoise:
Miss Ellen, versez-moi le Thé
Dans la belle tasse chinoise.

Là, sous un ciel rouge irrité,
Une dame fière et sournoise
Montre en ses longs yeux de turquoise
L'extase et la naïveté:
Miss Ellen, versez-moi le Thé.

Théodore de Banville

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